HHhH, Laurent Binet

La Recrue du mois ne se limite pas à la littérature québécoise. Chaque mois, un membre de l’équipe lit et commente un premier roman hors Québec. Ce mois-ci, j’ai lu HHhH du français Laurent Binet qui s’est vu remettre le prix Goncourt du premier roman 2010.

Décidément le nazi Reinhard Heydrich est populaire chez les primo-romanciers. J’ai parlé il y a quelques semaines de L’âme du Minotaure de Dominike Audet. Il s’agit ici d’un premier roman de Laurent Binet, un auteur français, qui signe un livre au titre mystérieux. Ce HHhH signifie Himmlers Hirn heisst Heydrich : le cerveau d’Himmler s’appelle Heydrich. Mais il ne faut pas se fier au titre. Heydrich n’est pas le sujet du roman. Les personnages principaux sont plutôt Jozef Gabčík et Jan Kubiš, les deux assassins d’Heydrich. Ce Tchèque et ce Slovaque sont parachutés par la résistance tchécoslovaque pour supprimer le protecteur de Bohême-Moravie, oppresseur des Tchécoslovaques et symbole de l’appareil nazi.

Laurent Binet nous plonge dans les dessous de l’opération Anthropoïde et ses conséquences fatales pour ces deux hommes. Ce roman se veut et constitue réellement un superbe hommage à ces hommes, à leurs complices et à ceux qui ont rendu possible leur vie clandestine pendant de nombreuses semaines dans un pays occupé et dirigé par les nazis. L’auteur présente le contexte de l’époque. Il ne traite pas son sujet dans des limites strictes mais peint un portrait plus global de la situation de la région et de la situation de chacun des intervenants. Il y a plusieurs digressions par rapport au sujet principal mais elles sont nécessaires et s’insèrent bien dans le récit.

J’ai eu quelques réticences au début quand l’auteur/narrateur se donne un rôle dans le roman et donne son avis sur certains personnages. Il fait aussi part de ses hésitations à raconter une histoire sans romancer et ainsi travestir l’Histoire. Je me suis demandé si cela apportait vraiment quelque chose au roman. Mais c’est aussi le moyen pour l’auteur de faire preuve de respect pour ses personnages (qui ne sont pas vraiment les siens). Comme lecteur, j’ai accepté ce style car le récit est fluide et pose quelques questions sur le genre des romans historiques. Et ça fonctionne parce que c’est sincère. J’ai senti tout au long du roman la passion de Laurent Binet pour son sujet et son honnêteté envers le lecteur.

Voilà donc un premier roman original par sa forme et par la passion de son auteur. Je vous mets par exemple au défi de lâcher la lecture dans la partie du roman qui raconte l’héroïsme de Gabčík et Kubiš jusque dans leurs derniers instants. À lire.

4 réflexions au sujet de « HHhH, Laurent Binet »

  1. J’ai beaucoup aimé ce livre et ce jeune auteur français nous fait également découvrir Prague, ville où il a vécu. Laurent Binet décrit bien, enfin, la machine nazie et le rôle d’Heydrich.

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    1. C’est un aspect dont je n’ai pas parlé et tu fais bien de le souligner : l’auteur professe un véritable amour pour Prague et plus généralement pour la République Tchèque et la Slovaquie. J’ai lu qu’il y avait vécu lors de son service militaire.

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