La recrue du mois de septembre est Daniel Grenier avec son premier recueil de nouvelles intitulé Malgré tout on rit à Saint-Henri.
Disons le tout de go, Saint-Henri n’est ni le sujet principal ni le thème qui unit les nouvelles de cet ouvrage. La toile de fond des nouvelles est parfois ce quartier ouvrier de Montréal mais Saint-Henri est surtout une manière pour Daniel Grenier de fixer un repère dans son écriture. C’est une atmosphère qui transpire dans ce livre. Peut-être dira-t-on plus tard de Daniel Grenier qu’il a eu une période Saint-Henri comme Picasso a eu une période bleue.
Bien qu’hétérogènes dans les thèmes et le style, les nouvelles de Malgré tout on rit à Saint-Henri partagent comme point commun la posture de l’auteur comme observateur du quotidien. Kaléidoscopes de moments fugaces, de portraits et de dialogues, les textes de Daniel Grenier sont des invitations à la réflexion. C’est particulièrement le cas pour les nouvelles consacrées à des portraits, à des anecdotes ou à des descriptions d’itinérants. Courtes et percutantes, ces nouvelles prennent à la fois des allures de carnet d’exploration urbain et de journal intime. Elles suscitent des interrogations chez le lecteur. On ne voit pas toujours très bien où Daniel Grenier veut en venir : ni argument ni chute à la fin de la nouvelle mais les textes proposent une ambiance et un point de vue sur des événements tous simples.
D’autres nouvelles, plus longues et plus construites amènent un autre rythme de lecture. Ainsi cette histoire d’un narrateur épris d’immigrants brésiliens qui est la nouvelle la plus longue du recueil. C’est celle qui ressort le plus car elle est la plus fouillée et la plus dérangeante. La passion et le malaise sont palpables tout au long du récit. Ambiance malsaine également pour le récit du service funéraire d’une jeune femme nommée Ariane. Daniel Grenier ne choisit pas des thèmes faciles. Même quand on suit un pensionnaire de CHSLD qui cherche à s’échapper, l’humour, bien que présent, suscite des rires jaunes. Et que dire de l’ambiance sombre dans la nouvelle qui décrit un kidnapping. Moments étranges, presque intemporels, instants fugaces, récits sombres, je ressens une approche intellectuelle dans l’écriture de Daniel Grenier. Observateur attentif, il tourne autour des événements pour prendre l’angle le plus intéressant, celui qui va donner du relief au récit.
Ca ne fait pas de Malgré tout on rit à Saint-Henri un livre grand public mais il plaira aux profils de lecteurs plus littéraires qui trouveront amplement leur compte dans l’univers et le style de Daniel Grenier.
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